Le rôle des Esters dans le caractère fruité des jeunes vins

Impossible de parler de l'arôme des vins sans évoquer les esters. Cette famille chimique de composés aromatiques joue un rôle très important dans le caractère fruit des jeunes vins blancs, rosés et rouges.

Parmi eux, les esters ethyliques d'acides gras et les acétates d'alcools supérieurs marquent aromatiquement les vins jeunes. Ils sont essentiellement produits durant la fermentation alcoolique et il est possible de favoriser ou non leur production pendant la vinification.


L'importance des esters dans l'arôme des vins

Les esters portent parmi les principaux groupes de composés aromatique dans les vins et elle est la famille principale marquant l'arôme fruité des vins jeunes. Largement étudiés, plus de 100 esters ont été identifiés dans les vins et sont présents à des niveaux de concentration différents.

Les esters ont 2 origines : ils sont issus du processus fermentaire par estérification  de nature enzymatique ou ils sont produits durant le vieillissement des vins par estérification de nature chimique. Cette dernière voie de synthèse est cependant plus négligeable que la première.

Plusieurs familles d'esters se distinguent

- les esters ethyliques d'acides gras (EEAS)

- les acétates d'alcools supérieurs (AAS)

Ils sont produits durant la fermentation alcoolique (FA) par l'activité enzymatique du métabolisme lévurien. Ils sont perceptibles dans les vins jeunes et caractérisent notamment les arômes fruités fermentaires.

Les esters ethyliques d'acides gras (EEAG)

Ils sont issus de la réaction d'estérification des acides gras butyrique, hexanoïque, octanoïque et decanoïque, avec l'ethanol. Les acides gras a plus longues chaines sont trop lourds et trop gras pour participer aux notes fruités.
Dans les vins, les EEAG sont présent en quantité inférieur à leur seuil de perception, mais les effets synergiques avec d'autres composés aromatiques participent à l'arôme fruité rouge et frais des vins jeunes.

La présence de ꞵ-damascénone, ꞵ-ionone, ou DMS intensifie l'arôme fruité des esters.

Les acétates d'alcools supérieurs (AAS)

Les alcools supérieurs sont les alcools avec un nombre de carbone supérieur à l'éthanol. Ils réagissent avec l'acide acitique pour former des acétates d'alcools supérieurs. 

Les notes aromatiques de sAAS sont plus lourdes que les EEAG et des teneurs trop importantes en AAS risque de masquer l'arôme variétal. Les molécules les plus petites d'AAS sont l'acétate de propyle, l'acétate d'isobutyle et l'acétate de butyle. Ils présentent des odeurs de fruits frais. L'acétate d'isoamyle est l'AAS présente en plus forte proportion des les vins. Il est facilement reconnaissable par son odeur de banane et de bonbon anglais.

Parmi les AAS, les plus importants dans le caractère aromatiques des vins citons également l'acétate de 2 methylbutyle ou l'acétate de 2 phénylétyle (caractère floral).

Comment piloter en chai la concentration en esters des vins ?

Des fermentations lentes et régulières favorisent la production d'esters.

Gorgia Lytra, dans une thèse publiée en 2010, souligne que la concentration des esters dans les vins est d'autant plus importante que les fermentations sont lentes et difficiles. Un constat que relativise Francine Calmels (Oenologue conseil au laboratoire oenologique départemental de Gaillac) "plus les fermentations sont lentes et régulières, plus la concentrations d'esters augmentent. Mais, les fermentations trop languissantes ont tendance à perdre les esters jusqu'alors produits."

Cette observation est confortée par de récents travaux de recherche : l'augmentation de la température, qui accompagnent généralement les fins de fermentations difficiles, induit une diminution de la concentration d'esters dans les vins. En effet, il est observé que plus la vinification est réalisée à basse température et plus la concentration en esters est importante.

Des levures et des bactéries oenologiques productrices d'esters

La synthèse des esters est dépendante de la souche de levure et de ses activités enzymatiques. Ainsi, Antalik démontre que la génétique peut être un facteur limitant la synthèse des AAS car elle dépend "de l'expression des gênes codant pour les enzymes de synthèse (ATF1 et ATF2)."

DE nombreuses sociétés de produits oenologiques proposent des souches de levure favorisant la production d'esters. Pour Francine Calmels "il est difficile d'apporter une conclusion quant à l'efficacité des levures sur la production d'esters, même si effectivement, certaines levures produisent des vins très aromatiques.

A noter, également, que les bactéries oenologiques, lors de la fermentation malolactique, jouent également un rôle non négligeable sur la concentration en esters du vin. Oenoccucus Oeni (une des bactéries impliquées dans la FML) produit des enzymes capables d'hydrolyser mais également de synthétiser des esters. 

Le choix de la souche des bactéries oenologiques sélectionnées aura donc un impact sur le profil fruité frais du vin.

La composition du milieu, un facteur essentiel

"J'ai remarqué que les moûts clarifiés et limpides présentaient un profil en esters plus important. Ils ont également plus net et pointu, mais ils perdent un peu en gras et en matière" témoigne Francine Calmels.

En effet, la concentration d'esters diminue avec l'augmentation des acides gras insaturés et des stérols, éliminés lors des opérations de clarification.

Par ailleurs le taux d'azote dans les vins inhibe généralement la concentration d'esters. Ces molécules aromatiques très fragiles seraient également sensibles aux hautes teneurs en oxygène.

Le temps, l'ennemi des esters et du caractère fruité des vins

Avec le temps, la concentration des esters diminue dans les vins par hydrolyse chimique, confirmant les liens entre esters et caractère fruité des vins jeunes. Une observation également confirmée par France Calmels " les esters sont des molécules aromatiques très fragiles. il est plus difficile de les conserver dans le vin que de les produire." "Nous avons souvent des chutes d'esters après un soutirage ou un sulfitage", conclut-elle. Elle note également la diminution de l'utilisation du SO2 en phase pré-fermentaire et la bio-protection permet souvent d'obtenir des vins riche en esters.


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